Les aires marines protégées (AMP) attirent plus d’attention depuis que les accords internationaux sur la biodiversité les considèrent comme des instruments majeurs pour stopper les extinctions massives d’espèces et rétablir la santé des océans. À l’initiative des députés européens Stéphane Bijoux et Catherine Chabaud, la réunion hybride du 7 novembre 2023 au Parlement européen a présenté les résultats du projet de gouvernance des océans de l’UE ainsi que d’autres projets connexes. Dans la perspective de la prochaine Conférence des Parties à la Convention sur la Diversité Biologique (CDB) et de la troisième Conférence des Nations Unies sur les Océans (UNOC3) organisée par la France et le Costa Rica en 2025, l’événement visait à mettre en évidence le rôle technique et stratégique des réseaux de gestionnaires d’AMP pour aider à concrétiser cette ambition.

En mobilisant les efforts de conservation marine et en catalysant la connaissance et le savoir-faire des gestionnaires d’AMP et de leurs partenaires, les réseaux d’AMP sont essentiels pour renforcer l’efficacité de la gestion des AMP et ainsi apporter des contributions écologiques, sociales et économiques tangibles à la préservation de la biodiversité marine mondiale et aux Objectifs de développement durable (ODD). Le projet de gouvernance de l’océan de l’UE a été financé par le Service des instruments de politique étrangère (FPI) de la Commission européenne à l’initiative du Parlement européen.  Il était donc naturel de rendre compte de l’avancement de la mise en œuvre, qui, comme beaucoup d’autres initiatives, a souffert des restrictions imposées par la pandémie. Dans son discours d’ouverture, le député Bijoux, représentant de l’île de La Réunion, dont il est originaire, a expliqué comment son lien avec l’océan l’avait amené à promouvoir le projet. Alors que les effets de l’élévation du niveau de la mer et d’autres impacts du changement climatique se font déjà sentir, il est important de renforcer la coopération internationale pour protéger les océans. Il est convaincu que les réseaux d’AMP – appelés « ceinture bleue » – sont le meilleur moyen de combiner les objectifs écologiques et économiques.

Deux brèves allocutions ont ensuite planté le décor. La première a été prononcée par l’ambassadeur Olivier Poivre d’Arvor, envoyé spécial du président de la République française pour la Conférence des Nations unies pour l’Océan (UNOC), qui a souhaité la tenue d’une conférence ouverte à tous et orientée vers l’action. Il s’attend à ce que le soutien politique fort qui se développe dans la perspective de l’UNOC3 crée un nouvel élan pour une coopération accrue en faveur d’un océan sain et productif. Il s’est montré ouvert à l’adoption du concept de ceinture bleue, en accord avec les règles et procédures des Nations unies.

Le représentant de la directrice de la DG MARE/B, Céline Idil, a souligné l’urgence d’assumer la responsabilité collective d’un océan propre, sain et productif. Les deux traités sur la biodiversité désormais ouverts à la ratification devraient changer la donne: le cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal (Kunming-Montreal Global Biodiversity Framework) et le traité des Nations unies sur la haute mer, également connu sous le nom de Traité sur la biodiversité au-delà des limites de la juridiction nationale ou BBNJ treaty. À l’heure où nous écrivons ces lignes, 83 pays ont désigné le traité. La coopération est essentielle pour progresser vers la mise en œuvre.

Purificació Canals, coordonatrice technique du Projet de gouvernance de l’ Océan de l’UE a présenté un rapport détaillé sur la façon dont le projet s’est branché à différents réseaux de gestionnaires d’AMP dans l’Atlantique, l’océan Indien et l’océan Pacifique, dans le but d’apprendre les uns des autres et de travailler à une plus grande efficacité du projet. Après la courte période de mise en œuvre du projet, il reste encore beaucoup à faire. À l’avenir, il faudra accorder encore plus d’attention à la mobilisation d’un soutien politique plus fort et au financement des réseaux et des AMP.

L’eurodéputée modératrice Catherine Chabaud a tiré une première conclusion en affirmant que la coopération autour de l’océan et des AMP servait à préserver la paix, une caractéristique particulièrement critique dans le monde d’aujourd’hui et qui nécessitait un soutien continu de la part de l’Europe et d’autres pays et régions.

Carole Martinez, du projet MEDPAN, a rappelé que la collaboration entre les gestionnaires d’AMP de la Méditerranée s’inscrivait dans la même logique.

La plupart des AMP n’ont été décrétées que relativement récemment et n’ont donc pas encore produit les effets de restauration de l’écosystème que l’on attend d’AMP matures et à long terme. Le renforcement des capacités de gestion par le biais d’un apprentissage commun est essentiel pour atteindre ces objectifs.

Jihyun Lee, du secrétariat de la CDB, a reconnu l’importance des AMP pour la préservation de la biodiversité marine, mais elle a rappelé que le cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal ne se limitait pas à l’objectif 3, à savoir les AMP. Elle a insisté sur le fait que tous les pays, les citoyens et les organisations étaient indispensables pour mettre en œuvre le cadre. Un large éventail d’outils et d’approches a été mis à disposition pour répondre aux principales menaces.

Il est important d’établir des liens avec divers autres groupes, y compris au niveau local, afin de faciliter le renforcement des capacités et la mise en œuvre. Elle a invité à tirer parti de toutes les organisations et initiatives aux vues similaires pour permettre le changement nécessaire à grande échelle. Elle a notamment fait mention du «dialogue mondial pour un océan durable»

Plus d’explications sur le projet de l’UE, le programme et les orateurs sont disponibles ici.

Mundus maris a saisi l’occasion à la fin de la session de questions-réponses, pour poser deux questions, exprimant en particulier son inquiétude quant à la déclaration inflationniste des AMP, dont la plupart sont malheureusement des «parcs en papier». La deuxième question portait sur le fait de savoir si et comment les droits des pêcheurs artisanaux, hommes et femmes, allaient être entendus et impliqués dans l’établissement de nouvelles AMP afin d’atteindre l’objectif de protection de 30 % des océans d’ici à 2030. Compte tenu des résultats médiocres obtenus jusqu’à présent, il a également été suggéré que la participation des pêcheurs à des événements-clés lors de la troisième Conférence des Nations unies pour l’Océan (UNOC3) ou en préparation de celle-ci pourrait servir d’exemple pour promouvoir ces processus politiques.

Puri Canals a réagi en soulignant la nécessité de réaliser des progrès rapides en matière de protection efficace des aires marines protégées. Elle a confirmé que les «parcs en papier» étaient LA question à laquelle tous les gestionnaires et toutes les organisations étaient confrontés et que les gouvernements étaient appelés à mettre en place des ressources suffisantes et continues avec du personnel qualifié afin de donner l’espoir d’un rétablissement de la biodiversité et de ses multiples avantages.

Dans ses remarques finales, la députée européenne Catherine Chabaud a résumé la situation ainsi: L’océan est un bien commun mondial et, en tant que gardiens, nous avons la responsabilité de sa santé.

Vous trouverez plus d’informations ici et la rapport institutionel de l’événement ici.

Traduction française de Christiane van Beveren.